Vengeance sanglante à la cour des shoguns


Mizu, surnommée « Blue Eye Samurai », dans la série d’animation « Blue Eye Samurai », créée par Amber Noizumi et Michael Green.

NETFLIX – À LA DEMANDE – SÉRIE

Pour les plates-formes de streaming, les océans n’existent pas. Sur Netflix, on peut voir, en ce moment, la version animée de Scott Pilgrim, nouvel avatar d’un comics américain d’inspiration japonaise, qui met en scène un adolescent prolongé, natif de Toronto. Scott Pilgrim a été réalisé par l’un des plus fameux studios d’anime de Tokyo, Science Saru. Presque en même temps, on a découvert le regard implacable du Blue Eye Samurai (« le samouraï à l’œil bleu »), né de l’imagination d’un couple de scénaristes américains, Michael Green (auteur, entre autres, des scénarios de Logan et de Blade Runner 2049) et Amber Noizumi. L’animation de la série a été confiée à un studio français, Blue Spirit.

Ce qui tombe bien : l’hybridation est au centre de Blue Eye Samurai, de sa sanglante intrigue, mais aussi de sa mise en scène baroque et rigoureuse à la fois. Mizu, la protagoniste, est née des amours illicites d’une Japonaise et d’un Européen, au moment où le Japon des shoguns fermait ses portes aux étrangers, dans la première moitié du XVIIe siècle. La couleur de ses yeux, son teint en font un objet de révulsion.

Persécutée dans le village où elle erre après la mort de sa mère, elle trouve refuge auprès d’un forgeron aveugle, qui lui apprendra à façonner les outils de sa vengeance, que la jeune femme veut exercer à l’encontre des quatre hommes qui pourraient l’avoir engendrée, quatre Européens restés au Japon après l’entrée en vigueur de la fermeture des frontières.

Grâce inquiétante

Dans cette quête obsessionnelle, Mizu, qui se fait passer pour un homme, laisse derrière elle un nombre incalculable de cadavres, dont le sang dessine des idéogrammes indéchiffrables. Cette violence coule au confluent des adaptations au goût occidental de l’esthétique japonaise (Sergio Leone ou Quentin Tarantino) et des films de sabre du cinéma populaire, dont l’archétype fut la saga du bretteur aveugle Zatoichi. L’animation permet aux personnages de combattre ou de souffrir en dépit des lois de la gravité ou de l’anatomie ; mais pas des contraintes d’une chorégraphie qui organise des plans d’une grâce inquiétante.

L’animation tourne délibérément le dos à l’esthétique de l’anime japonais, visant (et atteignant) une vraisemblance et une relative sobriété dans les expressions et les gestes quotidiens. Quelle qu’ait été la part numérique de cette création (et, de toute évidence, elle est grande), elle n’empiète jamais sur les émotions, que celles-ci naissent des situations ou de la beauté des arrière-plans, paysages ou intérieurs.

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